Créer
une atmosphère Les photographies de la Nouvelle France (p. 85), la place Dauphine (p. 95) ou encore du château de Saint-Germain (p. 131), frappent par l’impression de solitude et de froideur qui émane d’elles. Avec leurs sièges vides, leurs rues désertes, elles semblent souligner une absence et créent une atmosphère de tristesse qui est à l’image de l’errance de Nadja et de Breton par les rues et la vie, sans nulle figure humaine à laquelle se raccrocher. |
|
Les reproductions picturales
participent également de ce climat mystérieux ; l’étrangeté
du retable page 110, dont le carrelage au sol fait écho au tableau
de Chirico page 151, les titres des deux œuvres, La Profanation
de l’Hostie et L’Angoissant voyage, ou encore
le tableau de Braque page 150 (Le Joueur de guitare) font sourdre
une inquiétude, une menace diffuse. (Pour toutes ces oeuvres picturales,
voir la page Echos 4) Ainsi les images permettent de créer un climat, de suggérer des émotions : elles ont une puissance d’évocation propre. |
|
Fonction
symbolique Les images ont également une fonction symbolique
qui conduit à une lecture parallèle du livre. Ainsi, la
première photographie, celle de l’hôtel des Grands
Hommes, évoque grâce à la roue, le destin en marche. |
|
Lors de l’épisode des Tuileries
(p. 98-103), c’est Nadja elle-même qui déchiffre le
symbole du jet d’eau, métaphore de la pensée des deux
amants :
Devant nous fuse un jet d’eau dont elle paraît suivre la courbe. « Ce sont tes pensées et les miennes. Vois d’où elles partent toutes, jusqu’où elles s’élèvent et comme c’est encore plus joli quand elles retombent. Et puis aussitôt elles se fondent, elles sont reprises avec la même force, de nouveau dans cet élancement brisé, cette chute... et comme cela indéfiniment. » (p. 100) C’est encore elle qui établit des rapprochements entre les œuvres d’art qui ornent l’appartement de Breton et certaines de ses préoccupations (p. 146-154). L’extrême sensibilité de Nadja aux mystères des symboles et son intuition la rendent capable d’associer l’apparence des choses qu’elle contemple à d’autres réalités, de façon spontanée. Elle possède le don d’établir des correspondances, de déchiffrer l’image, jusqu’à la divination, et c’est ce qui intrigue le plus Breton. Ce don de voyance qui transparaît dans son regard (voir les yeux de fougère p. 129) et qui fait s’interroger Breton (« Que peut-il bien se passer de si extraordinaire dans ces yeux ? Que s’y mire-t-il à la fois obscurément de détresse et lumineusement d’orgueil ? » p. 73) lors de leur première rencontre, ne peut que rappeler le regard de Mme Sacco, la voyante (p. 91) ou celui halluciné de Desnos (p. 34). Ainsi l’image photographique se muant en symbole, renvoie à
une autre réalité, et acquiert une portée propre
qui entre en résonance avec le texte et l’enrichit. Entre
la réalité de l’image et celle du texte, se produit
enfin cette étincelle décrite dans le Manifeste. |
|
Accueil |